La Casa qui traverse Notre Amérique avec sa cargaison d'horizons


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Le poète Jorge Boccanera a évoqué la solidarité de Cuba qui, « bien que subissant les conséquences d'un blocus obscène, brutal et croissant, a donné de nombreux exemples au monde ». Photo: José Manuel Correa

Ce fut un grand plaisir et un honneur pour le poète, critique et journaliste argentin Jorge Boccanera d'être invité à prononcer le discours d'ouverture de la 62e Édition du prix Casa de las Americas, qui s’est tenu du 25 au 28 de ce mois, avec plus de 1 600 œuvres en concours dans les genres poésie, roman et essais sur des thèmes historiques et sociaux.

Après avoir remercié chaleureusement Abel Prieto, président de la Casa de las Américas, Alpidio Alonso, ministre de la Culture, et Jorge Fornet, directeur du Centre de recherches littéraires (présents dans la salle Che Guevara), et après la présentation du jury, composé de spécialistes, certains présents et d’autres en ligne, Boccanera – lauréat du prix Casa en 1976 pour son recueil de poésie Contraseña – a fait l'éloge de l'institution, de Cuba et de la poésie, dans un remarquable discours qui a été longuement applaudi.

Conscient qu'à cette occasion « le prix acquiert une nuance particulière parce qu'il porte l'empreinte d’un moment avec lequel on renoue même dans les conditions adverses d'une pandémie », le poète a évoqué, en premier lieu, de la Casa « née avec la Révolution cubaine », dirigée par Haydée Santamaria, « une femme lucide » et « aux fermes convictions », les intellectuels Mariano Rodriguez et Roberto Fernandez Retamar lui succèdent, puis il a rappelé -– à partir d'un discours prononcé en 1961 par Retamar – les paroles de Che Guevara à propos du projet Casa, qui permettrait de mettre en valeur « le patrimoine culturel de toute Notre Amérique ».

Pour Boccanera, il était opportun de faire référence aux destinées de la poésie, après avoir rappelé les raisons qui l'y ont conduit, et il a assuré que malgré certaines distances que certains peuvent éprouver, « la poésie est toujours là ».

« En étirant la corde un peu plus loin, nous pourrions même voir la poésie comme la contrepartie du discours hégémonique actuel qui naturalise un langage mondialisé entre la technicité belliciste, la brochure publicitaire et la vacuité de l'industrie des loisirs ; une nomenclature qui élargit le langage du tricheur avec la post-vérité et les fake news, ce à quoi s’ajoutent le jargon fallacieux de l'euphémisme qui camoufle, falsifie, élude, dissimule et déforme. Il me semble que, tandis que l'euphémisme masque, la poésie amplifie et dissémine le sens de ses obsessions avec un effet irradiant qui se double d'une proposition de lectures multiples », a-t-il déclaré.

Dans un discours dans lequel il a cité, entre autres, Eliseo Diego et César Vallejo, il a défendu la poésie « comme un joyau d'images entrelacées, un mariage de perception réelle et d'augure qui se situe entre l’aperçu spirituel et l'œil critique face à une subjectivité aliénée, saturée d'indifférence, de voracité consumériste et d'un individualisme plongé dans une compétition féroce qui perçoit l'autre comme un ennemi ».

Il a fait référence à la solidarité de Cuba qui, « malgré les conséquences d'un blocus obscène, brutal et croissant, a donné de nombreux exemples au monde, comme la Brigade internationale de médecins Henry Reeve », et il a reconnu comme l'un des « visages de Cuba » la « Casa de las Américas, qui réalise un immense travail pour l'art et la connaissance humaniste de notre culture, comme un laboratoire de "questions"». Et d’affirmer : « Dès mon plus jeune âge je me suis rendu dans ce mirador qui m’a donné accès à des matériaux et des outils pour m'aider à créer, à réfléchir, à débattre et à discerner ; cela a donc été une école pour moi, surtout à une époque où, en Argentine et dans d'autres pays d'Amérique latine, des milliers d'opposants étaient assassinés et des tonnes de livres étaient brûlées ».

En conclusion, et après avoir fait référence à l'exhortation de Julio Cortazar à marcher vers les horizons et à les conquérir, il a salué le public de « cette maison qui parcourt Notre Amérique depuis des décennies avec sa cargaison d'horizons ».

 


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